Dehors les tire-au-cul-de-sac

 —  Voici un article que nous nous permettons de relayer, issu de LA LETTRE À LULU. Bien que datant de 2015, il reste des plus pertinent pour illustrer la gentrification qui sévit chez nous sur fond de « démocratie participative » à la nantaise (arnaque médiatique largement utilisée par les gestionnaires de nos vies que sont le PS métropolitain nantais et ses alliés de tous bords).
Un grand MERCI au passage à LA LETTRE À LULU. Au fil des ans, grace à son travail de fond, elle nous tient informé.e.s de l’actu locale et contribue à sauvegarder un journalisme de qualité, perle rare dans un paysage médiatique en voie de décomposition bien avancée, pourri/faisandé qu’il est par sa collaboration permanente et orientée avec les instances dirigeantes… 
 

Dehors les tire-au-cul-de-sac

Merci Bernard d’hier

 

Nantes métropole a commandé le bulldozer à ratiboiser les pauvres, à Saint Herblain.

 

Cul-de-sac en bordure de périph, la cité de La Bernardière, à Saint-Herblain, est créée en 1984 pour des familles pauvres, sorties des baraques du « camp Blanchard » de l’après-guerre. Le bailleur Habitat 44, la ville et Nantes Métropole ont décidé de déloger les relogés de la cité de relogement. Et de détruire les 49 pavillons de ce village urbain. Les habitants ? Pas consultés. Le 29 mars 2015, le maire PS Bertrand Affilé lâche en réunion publique : « On ne demande pas aux habitants s’ils sont d’accord pour partir puisqu’ils ne seront pas d’accord... ». Pourquoi perdre du temps contre-productif avec les états d’âme de gens qu’on expulse de force ? Et tant pis pour le baratin : « La place des habitants est déterminante pour la réussite du projet », « la concertation au cœur du projet : la méthode pour construire le grand Bellevue s’appuie sur la coconstruction » et Johanna Rolland déclarant, « reconnaître la valeur de la parole des habitants a été au cœur de l’installation même du projet »(1).

 

​Bouge dehors !

Réalisé par des sociologues en 2011, un « diagnostic social » dit la double mise à l’écart, géographique et sociale de ces locataires de La Bernardière. Mais paraît qu’ils sont ingérables, et méchants : le 3 novembre dernier, en réunion publique sur le Grand Bellevue (restructuration englobant Nantes et Saint-Herblain), l’élue à la politique de la ville Myriam Naël(2) a quasi justifié qu’on s’en débarrasse en lâchant qu’ils l’avaient insultée. C’est sûr, en juin 2015, quand elle leur assène que leur village va être rasé, l’élue ne croule pas sous les mercis. La même Myriam dénonce pourtant, la main sur le cœur, le « discours condescendant en direction de la population aux revenus modestes (…) Chacun doit être persuadé que l’autre est aussi respectable que soi »(3). Pour respecter les gens de Bellevue, Myriam assure « prendre en compte non pas uniquement leur avis, mais bien leurs propositions, leurs revendications… ». Autre reproche, la vie « en vase clos » (ben, c’est un cul de sac…) : « J’ai l’impression que ce village est devenu la chose des habitants » soupire Bertrand Affilé.(4)
 

 

Bull immobilier

Avec tant de si bonnes raisons, il ne reste qu’à les rayer de la carte ! Pour le bien urbain, les bulldozers vont désenclaver le quartier, diversifier l’habitat, éradiquer la paupérisation et les conflits de voisinage. En avril 2016, un collectif de soutien se créé autour de ce « village à défendre ».

Comme le bailleur Habitat 44 a la fibre sociale, il a pondu une charte de relogement en écartant ces pauvres bougres, façon puzzle, relégués à Saint-Mars-La-Jaille, Thouaré, Saint-Père-en-Retz, Sainte-Luce et même ND des Landes (c’est tendance)… Avec parfois moins de 48 heures pour se décider à signer. À chaque départ, parpaings et plaques métalliques murent les accès aux maisons. Une dizaine de familles a dû accepter de partir, mais certaines veulent à tout prix revenir là où elles ont toujours vécu. Des ingérables, on vous dit.

Georges-Eugène Osmane

(1) www.grandbellevue-nantes-saintherblain.fr/la-concertation/
(2) 23e adjointe de Nantes, cooptée à la métropole, administratrice à Nantes habitat, présidente de l’École de la 2e chance, ex-militante de la Confédération syndicale des familles.
(3) Ouest-France, 29 décembre 2014.
(4) Ouest-France, 15 mai 2015.

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