Le « train du climat » vient jouer du pipeau à Nantes le 17 octobre

schtroumpfLe « train du climat » circule de ville en ville depuis le 6 octobre, propageant une propagande décomplexée en faveur de l’innovation technologique effrénée, sous le masque grotesque du capitalisme vert. Il était à Toulouse Matabiau mardi13, sera à Nantes samedi 17, à Lille le 24 et finira sa course à Nancy le 25 octobre.

À l’approche de la COP21 (21ème conférence des Nations Unies sur le réchauffement climatique) qui se tiendra au Bourget près de Paris entre le 28/11 et le 12/12/2015, les efforts de fumisterie des habituels imposteurs irresponsables se font de plus en plus frénétiques et apparents pour se réapproprier l’agenda écologique. Dernier exemple en date : le « train du climat ». À l’initiative de scientifiques toulousain-e-s [1], le docte véhicule circule de ville en ville depuis le 6 octobre. Il était à Toulouse Matabiau mardi13, sera à Nantes samedi 17, à Lille le 24 et finira sa course à Nancy le 25 octobre [2].

Innovation verte : les ordures circulent en train

À chaque étape, le même cérémonial se répète : une ribambelle de pontes locaux aux sourires béats s’avance sur un tapis rouge déroulé à même le quai et coupent un cordon bleu-blanc-rouge avant de monter à bord. Des scientifiques, autoproclamé.e.s « messagers du climat », repérables à leur tee-shirts bleus, les guident alors à travers les trois premiers wagons, qui abritent une exposition itinérante présentant différents aspects du système climatique – les cycles naturels, les changements causés par les humain.e.s et, pour finir, les scénarios désormais classiques « d’adaptation », faisant la par belle aux comportements individuels.

Jugeant leur bonne conscience écologique sauvegardée, les scientifiques de bleu vêtu.e.s font alors soudainement demi-tour, laissant leurs invité.e.s poursuivre à travers les trois wagons suivants, par lesquels on n’a d’autre choix que de passer pour ressortir de l’exposition [3]. Or si le discours scientiste des trois premiers wagons, selon lequel les problèmes et les solutions seraient avant tout technologiques et comportementaux, mérite en soi d’être démonté, la suite atteint un tel summum de crapulerie qu’une autre urgence prend en quelque sorte le dessus.

Patron.ne.s, technocrates : vos solutions sont nos problèmes !

En effet, ce sont les principales entreprises qui ont financé le projet qui, en plus de voir leur position de force confortée par le simple faite de soutenir un projet « vertueux », se sont réservé les trois wagons suivants pour présenter leurs « solutions » aux problèmes présentés précédemment. Petit tour d’horizon.

Tout d’abord, l’Union des Indistries Chimiques (UIC) déblatère un discours effarant de mauvaise foi sur son « engagement en faveur du climat », ses « innovations », etc. Mais un coup oeil à la liste de ses membres implantés dans la région toulousaine suffit à déceler la supercherie. Il s’agit en effet, entre autres, d’Héraklès, l’ex SNPE (société nationale des poudres et explosifs), dont l’usine, employant 80 personnes sur l’île du Ramier et figurant naguère parmi les principaux clients d’AZF, fabrique encore et toujours du perchlorate d’ammonium et des hydrazines pour les carburants de… fusées, d’Air Liquide, à Saint-Simon, qui fabrique de l’hydrogène pour… moteurs de fusée, d’Étienne Lacroix, qui fabrique pour les militaires des… fusées pyrotechniques, de Syntivia qui développe des nouveaux cosmétiques.

C’est ensuite au tour de Michelin, acteur historique de la propagande pro-automobile depuis l’époque où la France était le premier producteur mondial, de présenter son nouveau pneu dont la forme savamment profilée permet de réduire la consommation des véhicules… d’environ 6 %. Un peu plus loin, juste après trois petits sas équipés de gadgets censés représenter l’innondation, l’orage et la tempête, les assurances AXA prodiguent leurs bons conseils pour survivre aux évènements climatiques extrêmes [4]. Fort heureusement, les visiteur.euse.s ressortiront équipé.e.s d’un petit kit composé d’une lampe torche, d’une couverture de survie et d’une gourde souple, fort utile en cas de fin du monde inopinée.

Le reste des exposants et sponsors est du même acabit, des solutions domotique de E-Green, aux médicaments homéopathiques industriels des laboratoires Lehning, en passant par le discours toujours aussi colonialiste de la CIRAD et les sourires forcés et mal payés des agent.e.s d’accueil du groupe Armonia… Où sont les sacs pour vomir ?

Recherche nationale, bras droit du capital

Sur le quai, à quelques mètres du maire Jean-Luc Moudenc, du chef local d’AXA David Guillot de Suduiraut et des autres huiles qui faisaient les fier.e.s devant les caméras, un groupe de trublion.ne.s osèrent affirmer qu’il n’y avait aucune « solution » à attendre des plus grands pollueurs et exploiteurs : les patron.ne.s, les technocrates qui leurs construisent des ponts en or, les élu.e.s.

Le schtroumpf à lunettesLe plus déboussolé par ce message pourtant simple et suscitant même la bienveillance de la plupart des passant.e.s fut sans doute l’un des chercheurs présents. Pressé de se dédouaner, il s’est embourbé dans une piètre tentative de distinguer « eux » (les entreprises) et nous, les « schtroumpfs » (sic), pétris d’objectivité et de bonnes intentions, qui n’auraient « rien à voir » avec le reste du train. Juste derrière la tête de ce schtroumpf à lunettes, on pouvait pourtant voir, bien en évidence comme sur tous les wagons, les logos de l’union des industries chimiques et des autres.

Si on ne l’arrête pas, ce sinistre train accueillera chaque jour à son bord, de 10h à 18h30, outre quelque passant.e.s, des dizaines de collégien.ne.s et lycéen.ne.s des environs, amené.e.s là par convois pour s’y faire conscientiser. La manifestation est en effet labélisée par le ministère de l’éducation et figure en bonne place au programme de la très respectable « Fête de la Science ». Il s’agit là d’une illustration parmi d’autres de la stratégie de pipeautage selon laquelle la crédibilité offerte par les institutions scientifiques s’associe à l’argent des multinationales pour délivrer un message qui, au fond, arrange bien les uns comme les autres. Mais le casting des sponsors est cette fois tellement maladroit qu’il semble possible de faire un peu de bruit autour de cette affaire : pourquoi s’en priver ?

Notes

[1] Catherine Jeandel (LEGOS/CNRS), Serge Planton , (Météo France), Christophe Cassou (CERFACS/CNRS) et Béatrice Korc

[2] Trajet complet ici :http://trainduclimat.fr

[3] Car comme un agent de sécurité nous l’a bien fait remarquer lors que nous avons tenté de faire demi-tour, l’exposition ne se visite que dans un sens…

[4] Les proches des personnes tuées ou sinistrées lors de tels évènements apprécieront sans doute le petit frisson provoqué par l’attraction.

Le tract diffusé sur toulouse, réutilisable avec quelques modifs

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